Affaire "Condamnation d'Oumar Diawara par la justice ivoirienne" : Ce que perd la Côte d’Ivoire





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Alors que la Cour de justice de la CEDEAO avait rendu une décision en novembre dernier, condamnant l’État de Côte d’Ivoire au profit de l'homme d'affaires Oumar Diawara, la justice ivoirienne, dans une audience le 2 décembre 2021, a rendu un autre verdict.

Dans un procès qui a surpris plus d’un observateur par sa célérité, la justice ivoirienne a condamné l’homme d’affaires Congolo-Malien à 20 ans d’emprisonnement, 50 milliards FCFA d’amende et une interdiction définitive de séjourner sur le territoire ivoirien. Ses biens en Côte d’Ivoire ont été confisqués et un mandat d’arrêt international a été lancé contre lui.

Un procès considéré par beaucoup comme une fuite en avant de l’État ivoirien qui a perdu la face devant un individu et un subterfuge pour ne pas se soumettre à la justice communautaire. Mais en réalité, la Côte d’Ivoire peut-elle se dérober au verdict de la cour de justice de CEDEAO ? Il faut le dire tout net. Oui, le pays, même si théoriquement a obligation d’exécuter la décision de la justice communautaire puisqu’il est un pays-membre, peut ne pas se soumettre au verdict de la Cour basée au Nigeria. Parce qu’en réalité, l’instrument juridique de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest ne dispose d’aucun outil pour obliger l’un de ses membres à exécuter une décision qu’il a prise. C’est ce qui a fait dire, en mai 2017, au président de la Commission de la CEDEAO, Marcel de Souza : "À quoi serviront les décisions de la Cour de justice de la CEDEAO ou de l’UEMOA, si nos institutions et nos Etats ne les honorent ou ne les appliquent pas eux-mêmes ?" Une question qui avait plutôt les allures d’un plaidoyer.

Déjà, en avril 2020, les autorités ivoiriennes avaient décidé de retirer la déclaration de reconnaissance de la compétence de la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples. C’était la conséquence directe de l’arrêt de cette Cour rendu le 22 avril 2020 et qui ordonnait la suspension du mandat d'arrêt contre Guillaume Soro et la remise en liberté provisoire de ses 19 partisans. 

La Côte d’Ivoire n’est donc pas à son premier coup concernant les juridictions internationales. Elle est désormais donc reconnue pour être l’un des États africains qui usent de subterfuges pour ne pas exécuter les décisions des juridictions internationales et communautaires.

En réalité, c’est la crédibilité de l’État ivoirien qui est fortement entachée dans cette affaire. Sinon, comment comprendre qu'Oumar Diawara soit jugé en tant que complice d’abus de biens sociaux, et le coupable véritable ne le soit pas. Car la logique voudrait bien qu’il soit le complice de quelqu’un d’autre. Pire encore, la justice ivoirienne le condamne et lui interdit définitivement de séjourner en Côte d’Ivoire. Où sera-t-il donc arrêté pour purger sa peine ? Quel État sérieux de la CEDEAO prendra-t-il le risque de l’interpeller tout en sachant que la Cour de justice communautaire l’a blanchit en condamnant la Côte d’Ivoire? On a l’impression que les autorités ivoiriennes ont tout mis en œuvre pour tenir loin de son territoire un homme d’affaires devenu gênant.

En définitive, c’est l’État ivoirien qui a tout à perdre dans cette affaire. C’est lui qui perd de sa crédibilité en démontrant qu’il ne respecte pas sa signature.

 

Modeste KONÉ

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