Alliance FPI-RHDP, ce que je sais





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Laurent Gbagbo n’est pas que politique. Il est avant tout un politologue. On le dit même professeur de la praxis politique. C’est dire…Au milieu des années 90, alors que se posait la question des alliances à faire ou à ne pas nouer, il s’est fendu d’une analyse qui a mis tout le monde d’accord. «Il n’y a pas d’alliances contre-nature. Il y a des alliances qui marchent ou qui ne marchent pas».

Et pour joindre l’acte à la parole, le leader du FPI, parti de gauche, qu’il était à l’époque a entraîné son parti dans une alliance avec le RDR dont les hommes de gauche disaient sur le moment qu’il était un parti d’extrême droite. Dans la continuité de cet acte, il nouera une alliance avec le PDCI-RDA, parti de droite, lors des élections locales de 2002 dans certaines localités du pays.

Comme pour dire qu’ils ont bien pigé la leçon du maître, lorsqu’il était aux prises avec la CPI en Hollande, donc loin de ses terres, ses disciples rassemblés dans deux factions rivales se sont mis tour à tour à draguer le PDCI qui était déjà dans une union avec le RDR. Le camp qui a eu les meilleurs arguments et qui a convaincu le parti de Bédié à sortir de cette union est celui d’Affi Nguessan dont les équipes et celles du nouvel allié se sont mises au travail.

Une fois revenu au pays après avoir gagné son procès, alors que certains observateurs pensaient à une remise en cause de la nouvelle alliance avec Bédié et le vieux parti, Laurent Gbagbo, fidèle à sa compréhension des alliances en politique, rentre dans le jeu. Manière d’adouber ses camarades qui ont eu le flair politique. Mais, comme il fallait s’y attendre, son entrée a provoqué la sortie immédiate du clan Affi qu’il ne voulait sentir ni de près ni de loin pour rien au monde.

Depuis cette date, c’est l’isolement du clan Affi qui était en pleine méditation, en train de «se chercher» quand, soudain, une lumière est apparue. Le parti au pouvoir, le RHDP, parti de droite, fait dire par ses émissaires de l’ombre, qu’il est possible de faire une alliance avec Affi et ses hommes. La nouvelle passe très mal au sein de la hiérarchie du FPI dans les premiers moments. Puis, avec le temps et vu les réalités politiques du moment, des ralliements se sont faits à cette «lumineuse» idée.

Convaincu qu’il n’y a pas d’alliances contre-nature et que ce qui compte c’est l’intérêt du parti, lequel doit se donner les moyens de parvenir à ses fins, le FPI se met à réfléchir sérieusement à la proposition du parti au pouvoir. «Mais pourquoi pas à la fin ? Si le PDCI et le parti de Gbagbo ne veulent pas nous sentir alors que la configuration politique exige que nous soyons dans une alliance pour atteindre nos objectifs, eh bien nous allons y aller», entend-on dire ici et là des responsables du FPI, Affi y compris.

Et puis, comme pour montrer sa bonne foi, le 13 novembre 2021, au Palais des sports de Treichville où se tenait le 6ème congrès extraordinaire du Front populaire ivoirien, Alassane Ouattara, président du RHDP, y envoie son directeur exécutif Adama Bictogo. Celui-ci déclare, particulièrement heureux de savoir que la main tendue sera saisie, surtout que Gbagbo venait de rompre avec son disciple Affi : «Notre présence ici ce matin traduit la volonté du RHDP, de son président Alassane Ouattara, d’un rapprochement avec son jeune frère le président Pascal Affi Nguessan».

Pour l’envoyé du président du parti au pouvoir, cette présence est aussi «l’expression de la volonté du président de la République, Alassane Ouattara, de réunir les Ivoiriens au-delà de notre divergence politique». Voilà donc qui est clair comme de l’eau de roche. Plutôt que d’accuser le FPI, par ce choix, de trahir la lutte, il serait judicieux de se demander ce que le FPI gagne ou gagnera dans cette alliance en gestation. Et, au finish, si cette décision permettra aux Ivoiriens de retrouver le sourire.

Sur ce point, les positions sont connues. En 2022, au moment du retour à la maison RHDP de l’UDPCI d’Albert Mabri Toikeusse, Alassane Ouattara a clairement indiqué pourquoi il n’était pas question pour lui de nouer une alliance avec Mabri dont le parti partage les mêmes convictions que le RHDP. Contrairement, avait-il insisté, au FPI qui est de gauche et qui ne saurait se fondre dans le parti au pouvoir. C’est dire qu’en tendant la main au FPI, Ouattara avait en tête l’idée selon laquelle il n’y a pas d’alliance contre-nature.

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Mais surtout, il savait à quoi il s’engageait. C’est-à-dire, à mettre sur pied une alliance électorale à toutes les étapes, dans le respect de la souveraineté de chaque parti et, en cas de victoire à la présidentielle, pour une co-gestion du pays. Selon le président du FPI, cette co-gestion aura pour but de travailler à la bonne gouvernance et à la lutte contre la corruption. Vue ainsi, cette alliance est à tout point de vue une bonne affaire pour le FPI et une bonne idée pour la cause de celles et ceux qu’il défend : les populations ivoiriennes.

Reste à savoir comment se fera la mise en route de cette nouvelle alliance et comment vont se comporter les deux partis politiques lors de la présidentielle prochaine, d’autant que Affi n’a pas renoncé à s’asseoir dans le fauteuil présidentiel et que Ouattara, de son côté, n’a pas encore mis une croix rouge sur un quatrième mandat.

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Abdoulaye Villard Sanogo

 

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