Édito : Faut-il faire confiance à Affi ?





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Le paysage politique ivoirien s’est recomposé. Le principal parti de gauche, le FPI, a subi le supplice de l’écartèlement. Mis en pièce par ses propres turpitudes, ses principaux quartiers se sont jetés dans les bras de la droite. Si Gbagbo et le PPA-CI se sont arrimés au PDCI de Bédié, Affi et « ce qu’il reste du parti » ont saisi littéralement et « avec soulagement, la main tendue du RHDP ». Autres temps, autres mœurs !

Cette recomposition, disons-le sans crainte d’être contredit, a le chic de nous rappeler que nous ne sommes plus sous le soleil du parti unique où tout le monde portait la même chaussure avec la même pointure. Les partis politiques en compétition se sont rendu compte qu’un seul parti, fut-il national ou riche en argent et en ressources humaines, ne peut plus gagner tout seul une élection.

Il faut se réjouir de cette prise de conscience qui a une valeur symbolique importante en démocratie. De fait, elle va obliger les partis politiques à l’humilité, au regroupement, à la négociation, donc aux discussions. Il y a sans doute plus important. Elle va les contraindre à donner et à recevoir. Ce qui n’était pas donné. Surtout qu’ici, les barrières idéologiques mal maîtrisées qui ont fait tant de mal à la cohésion sociale ont volé en éclats pour faire place nette à l’action politique constructive.

C’est cette situation que tente d’expliquer à sa manière Affi Nguessan, lors de la célébration de la Fête de la liberté à Man ce samedi 6 mai 2023. Devant ses partisans, le président du FPI nouvellement allié à Ouattara a martelé : « Vous tous réunis ici, vous savez les combats qui ont opposé le Fpi et le Rhdp. Vous vous rappelez tout ce que nous avons vécu ensemble à l’occasion de la désobéissance civile en 2020. Je suis persuadé que vous avez à l’esprit le combat du porte-parole des partis engagés dans cette désobéissance civile que j'étais ».

Affi tenait à montrer qu’entre les deux partis, « palabre est fini » non sans mettre le doigt sur les propos excessifs qu’il a tenus et qui lui ont valu des moments de grande souffrance : « Les propos que j’ai tenus, les mots que j’ai employés qui ont été souvent durs, mais vous savez aussi ce que j’ai subi comme meurtrissures : arrestation, emprisonnement avant d’être libéré ».

Toutefois, ajoutera-t-il, Ouattara qui, selon lui, veut faire avancer le pays, a tourné cette page pour lui tendre la main : « Mais le président Alassane Ouattara connaît tout cela. Il n’a pas hésité, en homme d’Etat d’une haute stature, dans l’intérêt supérieur de la Côte d'Ivoire, parce qu’il veut que ce pays sorte des sempiternelles crises que nous avons connues. Parce qu’il veut que le moment où il va quitter le pouvoir, il laisse à la nouvelle génération une Côte d’Ivoire réconciliée, une Côte d’Ivoire rassemblée ».

Les spécialistes qui observent tout se posent cependant des questions. Affi Nguessan est-il sincère quand il tient des propos dithyrambiques à l’endroit de Ouattara ? Affi aurait-il eu une telle attitude si la porte de l’alliance avec le PDCI ne lui avait pas été fermée ?

Au-delà de ces questions fondamentales qui peuvent trouver leur réponse dans la volonté affichée du chef du FPI d’aller à la paix et à la réconciliation et de dire sa vérité, il faudra peut-être qu’à l’avenir, les hommes politiques revoient leur langage parfois ordurier et aient chaque fois en tête que demain est toujours un autre jour. Peut-être que la politique ivoirienne s’en porterait mieux. Et ils n’auraient pas besoin de dire un jour et se dédire un autre jour.

Abdoulaye Villard SANOGO

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