Le Gabon, les élections, la fraude, le coup d’Etat et la grosse honte





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Les Ivoiriens qui savent dire les choses à leur manière ont pourtant averti et interpellé plus d’une fois la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). « Où est la CEMAC ? Où sont les chefs d’Etat de la sous-région ? Avec les décisions injustes qu’il a prises, ce sont les militaires qu’il est en train de biper comme ça », a écrit un internaute. Un autre a renchéri : « C’est le coup d’Etat qui est en téléchargement comme ça ». Et ça n’a pas loupé !

Depuis ce matin du mercredi 30 août 2023, à peine dix minutes après la proclamation des résultats des élections générales sur la télévision publique Gabon 1, notamment la présidentielle à un seul tour qui donnait Ali Bongo Ondimba vainqueur avec 64,27% des suffrages exprimés, les militaires sont montés au créneau pour annuler tout. Sur l’autre chaîne publique Gabon 24 logée au sein de la présidence de la République, un homme en treillis militaire, taille moyenne, béret noir sur la tête, entouré d’autres militaires aux bérets vert, rouge et noir, s’est adressé aux Gabonais, le ton plus que martial.

Après avoir prononcé l’annulation du scrutin du dimanche 28 août 2023 qu’il juge non transparent et non crédible, celui qui s’exprimait au nom d’un Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), a annoncé la fermeture des frontières et la dissolution de toutes les institutions de la République. Parce que, selon lui, les résultats que venait d’annoncer 10 minutes auparavant le président de la Commission chargée des élections sont « tronqués » et que par ailleurs, la gouvernance du pays est « imprévisible ».

Etait-il possible d’avoir une issue autre que celle-là ? N’ayons pas peur des mots et répondons non. C’était tellement prévisible que l’on peut même avancer que « le coup était téléphoné ». Au moment où les opinions africaines, soutenues par des militaires policés, se déchainent et parlent à qui veut les écouter et les entendre, au moment où elles clouent au pilori la France et « ses suppôts », quand on s’appelle Gabon, pays viscéralement attaché à cette France, on devrait être le premier à faire attention à tout.

Mais qu’ont fait Bongo et ses partisans ? Eh bien, exactement comme la France, leur parrain. Ils ont donné dans la démesure, l’arrogance, le mépris et la violence. Comment peut-on, en plein XIXè siècle et en plein vote crucial pour la tête du pays, couper l’Internet, compagnon fidèle des jeunes, ceux-là mêmes qui changent le résultat du vote ? Comment peut-on interdire les réunions pendant que le parti au pouvoir continue de se réunir ? Comment peut-on engager une chasse aux opposants que l’on arrête et jette en prison ?

C’est clair que le clan Bongo savait qu’il courait à sa perte. Il savait très bien qu’il ne gagnerait pas ces élections. C’est ce qui justifie toutes ces mesures obscures prises dans l’unique but de rester en vase clos et d’agir comme un poisson dans l’eau. La presse étrangère, les institutions électorales étrangères ainsi que les ONG n’étaient pas autorisées à rentrer au Gabon pour suivre comme de coutume ces élections 2023. L’opposition politique n’ayant pas accepté la façon dont le scrutin s’est tenu, il y avait manifestement une crise. D’où le pronunciamento de ce mercredi matin.

Le Gabon, c’est un petit pays de 267.667 km². Sa population, en cette année 2023, est de 2.385.569 habitants. C’est légèrement en dessous de la population de Yopougon et d’Abobo. Les électeurs appelés aux urnes, selon les chiffres donnés par le ministère de l’Intérieur, sont au total 846.000. En Côte d’Ivoire, le gouvernement a communiqué un total de 8.012.424 électeurs pour le 2 septembre 2023.

Dimanche 28 août 2023, les élections générales ont eu lieu au pays des Bongo. Pour un aussi petit pays très riche et avec seulement 846.000 électeurs, la distribution du matériel de vote y compris les bulletins de vote a été une catastrophe. Au point que certains bureaux de vote n’ont ouvert que vers 16-17h. Quant aux résultats, il a fallu attendre trois jours après la fermeture des bureaux de vote. Et c’est à 2h30 GMT soit 3h30 du matin au Gabon que le président de l’organe électoral a proclamé les résultats sans que les populations, sous un couvre-feu, aient été prévenues. En attendant les derniers développements de cette nouvelle crise politico-armée, en attendant de savoir si « les nouvelles autorités » vont asseoir leur pouvoir ou si elles seront chassées, il n’est pas superflu de dire que l’administration Bongo a planifié sa propre mort.

Quant à l’épidémie de coup d’Etat que fustigeait le président français Emmanuel Macron, elle continue sa marche vers le futur. Pour devenir une pandémie ? Qui peut l’arrêter ? Le pasteur Gédéon et ses hommes répondraient : « Question ! ».

Abdoulaye Villard Sanogo

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