59 ans, quel bilan ?





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La République de Côte d’Ivoire a célébré hier ses 59 ans d’indépendance. L’époque des fêtes nationales tournantes et fastueuses qui ont marqué les 20 premières années de l’indépendance étant d’un lointain souvenir, c’est dans la sobriété que les dirigeants ivoiriens et leurs concitoyens ont célébré les 59 ans.

 Seul un défilé militaire des forces armées avec la participation de détachements guinéen, marocain et français a marqué cette célébration sur le boulevard Valery Giscard d’Estaing (nom d’un ancien chef d’Etat français) à Abidjan-Treichville.

Au-delà de cette démonstration de force de l’armée, l’un des piliers de la souveraineté de tout Etat, quel bilan peut-on dresser des 59 années d’indépendance de la Côte d’Ivoire ? Les Ivoiriens peuvent-ils être satisfaits du cheminement de leur pays durant ces cinq décennies aux divers plans politique, économique, social, culturel et sportif ?

 

Double vainqueur de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), en 1992 puis en 2015, la Côte d’Ivoire a renforcé son assise en football en participant deux fois à la Coupe du monde (2006 et 2010). En athlétisme, basket-ball, handball et au tae kwon do, notre pays a remporté des médailles d’argent et d’or au niveau mondial et africain durant les années 80, 90 et 2000. La culture ivoirienne, à travers la musique (zouglou, coupé-décalé) et le cinéma, a porté haut le drapeau national sur le continent. Même si au plan de l’organisation, le sport et la culture charrient depuis plusieurs décennies un amateurisme criant. Les crises récurrentes au niveau des fédérations et les clubs sportifs ainsi qu’au Bureau ivoirien du droit d’auteur (Burida) en constituent des preuves éloquentes.

Cela dit, si un prix devrait être décerné, la Côte d’Ivoire n’en aurait pas dans le domaine de la politique. Tant le bilan des 59 années est négatif. Un coup d’Etat militaire aux ramifications civiles (1999), une rébellion armée avec des soutiens internationaux (2002), une guerre post-électorale (2010-2011), des acteurs politiques détenus à la cour pénale internationale (Cpi)… Trente ans d’instabilité politique, des milliers de morts et de blessés. Le processus démocratique entamé sur des chapeaux de roues a été totalement plombé, la cohésion sociale sabotée, des concepts exclusionnistes initiés par des acteurs politiques tels que l’ivoirité et le rattrapage ethnique, le pays perpétuellement au bord de l’implosion etc. Le grand échec des 59 ans d’indépendance de la Côte d’Ivoire n’est rien d’autre que l’aspect politique. Un échec favorisé en sous-main par l’ancienne puissance coloniale, la France, qui s’est rarement mise à équidistance des ambitions des différents acteurs politiques ivoiriens.

 

Avec un taux de croissance en moyenne de 8% depuis 2012, on pourrait affirmer que la Côte d’Ivoire est globalement sur la bonne voie depuis la fin de la crise postélectorale. Mais ce bilan macro-économique lié aux investissements dans les infrastructures est en total déphasage avec la réalité micro-économique qui touche directement le panier de la ménagère. A ce niveau-là, rien ne va. La paupérisation est galopante, la misère ne recule pas. Abidjan est devenu, au fil des ans, un gros bourg pris d’assaut par des faubourgs et des quartiers précaires. Le taux de pauvreté actuel indexé officiellement entre 46 et 47% relève plus de la démagogie que de la vérité. Tout comme le taux officiel du chômage qui serait de 26%. Comment peut-on y croire, dans un pays où l’informel fait plus de 80% des emplois et où les métiers précaires foisonnent à 90% ? Système de santé désuet, école en crise et en chute de crédibilité, tissu industriel très affaibli par les crises politiques, agriculture toujours traditionnelle… Autant d’éléments économiques et sociaux qui démontrent que la Côte d’Ivoire est mal partie depuis 1960.

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