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Diminution drastique de l'aide au développement : voici les conséquences sur les pays africains
4 mars 2025, 21:46

Crédits photo : Images 1, 3, 4 : Prises par Dominique Koba. Image 2: Photo prise sur le mur de l’ONU. L'Afrique face à la diminution de l'aide.

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De nombreux pays dits du Sud global dépendent en partie, depuis les années 1980, de l'aide publique au développement (APD) pour financer leurs besoins économiques et sociaux. Ces pays ont un faible indice de développement humain (IDH) et un produit intérieur brut (PIB) par habitant tout aussi faible. Ils sont situés principalement en Afrique, en Amérique latine, en Asie et dans certaines régions d'Europe et d'Océanie. La tendance actuelle à la diminution de cette aide remet en question leur modèle de développement et les pousse à rechercher des alternatives. Y arriveront-ils ?

C’est la mode. Tous les grands pays contributeurs à l’aide publique au développement (APD) freinent des quatre fers. Selon un article du Monde du 14 novembre 2024, l'Union européenne (UE) a décidé de réduire son aide au développement. En France, le budget prévisionnel pour 2025 prévoit une baisse de 1,3 milliard d'euros, soit une réduction de 34 %.

En 2025, le président américain Donald Trump annonce le retrait des États-Unis de plusieurs institutions internationales : 20 janvier 2025 : retrait de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ; 4 février 2025 : retrait du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies. Ces décisions impactent directement les pays du Sud global, notamment en Afrique, qui dépendent de ces fonds pour financer des secteurs essentiels comme la santé, l'éducation et l'agriculture.

Des conséquences économiques et sociales

La réduction de l'APD risque de provoquer une crise économique dans les pays qui en dépendent fortement. Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l'Union africaine (UA), déclare à ce sujet : « Les États-Unis, en tant que membre de l’OMS, ont joué un rôle crucial dans l’élaboration des instruments et des normes mondiales concernant la sécurité et le bien-être en matière de santé publique au cours des sept dernières décennies ». Le retrait brusque de l’Amérique de Donald Trump placera certainement les chefs d’Etat africains devant leur propre miroir, le miroir de la négligence. D’autant que dès 1980, la Conférence économique des ministres de l'OUA qui s’est tenue à Lagos au Nigeria avait déjà mis en garde contre cette dépendance sans limite de l’APD :

« Ces stratégies n’ont abouti qu’à maintenir l’Afrique dans un état de sous-développement et dans une dépendance excessive vis-à-vis de l’extérieur ». Aujourd’hui, d'après TV5 Monde, ces coupes budgétaires qui se font un peu partout fragilisent en priorité les secteurs de la santé, de l'éducation et de l'agriculture. Trois secteurs extrêmement importants en ce qu’ils touchent directement au quotidien des populations.

Impacts sur les secteurs stratégiques

Dans le secteur de l’éducation, l'Agence française de développement (AFD) souligne que l'APD finance la construction d'écoles, la formation des enseignants et l'achat de matériel pédagogique. De ce fait, une baisse de cette aide compromettrait l'accès à une éducation de qualité.

En ce qui concerne l’eau et l’assainissement, des chiffres officiels indiquent qu’en 2008, l'Afrique subsaharienne a reçu 27,5 % des décaissements nets de l'APD destinés aux pays en développement, soit 24 milliards de dollars pour l'eau et l'assainissement. Une diminution de ces financements risque de fermer l'accès à l'eau potable et aux services sanitaires.

Selon les mêmes chiffres, même l'agriculture africaine dépend fortement de l'APD pour développer les infrastructures rurales et l'irrigation. La fin de cette aide mettrait en péril la sécurité alimentaire. Pendant ce temps, les agriculteurs de l’OCDE continueront de recevoir des subventions agricoles de l’ordre de 300 milliards de dollars/an. Ce qui crée une concurrence déloyale, puisqu’avec les agriculteurs africains, ce sera un manque à gagner de 500 milliards de dollars de revenus.

Vers une autonomie financière

Selon plusieurs spécialistes, l’Afrique peut s’en sortir encore si elle ne met pas de temps à entamer sa transition vers la mobilisation des ressources internes. En novembre 2020, un article des Nations Unies expliquait déjà que l'Afrique pouvait financer son développement mais devait changer d'approche. Cristina Duarte, conseillère spéciale pour l'Afrique, affirmait : « Le défi de l'Afrique n'est pas l'absence de liquidité ou de fonds pour financer le développement. Ses problèmes sont des flux financiers illicites massifs qui drainent les capacités de financement et le manque d'appropriation des ressources naturelles, associés à tout un discours construit autour de la gestion de la pauvreté ».

L'article concluait alors de la plus belle des façons : « Passer d'une gestion de la pauvreté à une gestion du développement implique de privilégier la mobilisation des ressources internes plutôt que de dépendre de l'APD et de l'allègement de la dette. Cette approche favorise un financement durable et renforce l'autonomie des pays en développement ».

La diminution de l'APD impactera à coup sûr et lourdement les pays du Sud global, en particulier l'Afrique. Cependant, cette situation peut être une opportunité pour renforcer leur autonomie économique en misant sur l'optimisation fiscale, la lutte contre les flux financiers illicites et la valorisation des ressources naturelles. Pour y parvenir, une gestion rigoureuse et une souveraineté sur les secteurs clés comme l'éducation, l'agriculture, la santé et les ressources minières sont essentielles. Sans cela, ces pays resteront dépendants de l'aide internationale et vulnérables aux bouleversements économiques mondiaux.

DK

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